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28 janvier 2010 4 28 /01 /janvier /2010 16:01
Avec l'aimable accord de son auteur, voici un article très intéressant des Echos daté du 26 janvier 2010 :

Existe-t-il une loi du silence dans l'entreprise ? »

[ 26/01/10  Les Echos   ]

Par Eric Albert

Les nouveaux arrivants dans l'entreprise comprennent vite qu'il est préférable, pour eux, de ne pas aborder certains sujets. Il s'agit souvent de certains sujets concernant certaines personnes. Et, disons-le, c'est, presque toujours, des dirigeants dont il est question : de leurs comportements, de certains avantages ou parfois des relations qu'ils entretiennent entre eux. L'argument qui clôt l'échange est, en général, «  c'est comme ça ». Donc accepte-le comme tel et n'en parle plus ou… La menace est implicite.

C'est évidemment choquant sur certains avantages ou pratiques. Ca l'est encore plus sur les comportements. Rappelons qu'une des caractéristiques des comportements est de produire des effets sur les autres. Ainsi, tel dirigeant ayant tendance à critiquer ses collaborateurs en réunion génère une telle anxiété que tout ce qui lui sera présenté sera refait de nombreuses fois, au prix d'une sur-qualité coûteuse en temps et en énergie.

Le management par la peur

Tel autre, réputé avoir besoin d'une «  tête de Turc » dont il se moque en public, favorise des comportements d'allégeance par peur d'être le prochain bouc émissaire. Plus courant encore, les tensions relationnelles entre deux dirigeants que les équipes sont sommées de reproduire le long de la chaîne hiérarchique. structurant le conflit en une guerre de tranchées, qui alimente des noeuds de dysfonctionnement.

Le non-dit fait partie du jeu relationnel. Il est même indispensable pour permettre des temps d'ajustement mutuel et éviter de brusquer ou de blesser. Il sert aussi à préserver l'intimité de l'autre, à ne pas se montrer intrusif. En revanche, le non-dit devient dysfonctionnel lorsqu'il est à l'origine de tensions. Si les collaborateurs ne peuvent aborder un sujet concernant l'exemplarité des dirigeants (c'est-à-dire ce qui incarne le sens) ou leurs comportements, le non-dit est toxique.

Dans les cas décrits plus haut, le non-dit est une forme de loi du silence. Elle repose sur la peur qu'elle inspire aux collaborateurs. Sa fonction claire : permettre aux dirigeants de ne pas se remettre en cause. Il s'agit parfois de sujets mineurs comme certaines dérives comportementales sans grandes conséquences. Mais cette peur peut aussi être un mode de management systématisé que des managers entretiennent par perversion ou par confort.

Les dirigeants doivent instituer, pour l'ensemble des managers comme pour eux-mêmes, à titre exemplaire, la possibilité d'être questionnés sur leurs comportements comme sur leurs pratiques. Si les modalités doivent garantir une forme qui préserve de l'agressivité ou de toute forme de déstabilisation, le principe doit être affirmé et connu de tous. Les dirigeants qui imposent une loi du silence sont soit des faibles, craignant une remise en cause, soit des hypocrites, qui préfèrent ne pas avoir à justifier leurs pratiques. Un jour ou l'autre, cela se retourne contre eux, par défaut de résultat ou en raison des tensions relationnelles qu'ils ont créées.



Merci à son auteur pour son aimable autorisation.
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